Brame du cerf 2018
Le cerf est une espèce qui me fascine depuis mon plus jeune âge. Cet animal, qu'on nomme à juste titre le roi des forêts, se distingue par sa discrétion et son comportement farouche la majeure partie de l'année. Ce n'est qu'au début de l'automne, quand commence la période de reproduction, que les cerfs se font remarquer. Il est alors possible d'entendre résonner à travers bois et vallées les complaintes des grands mâles qui se disputent les femelles. Durant près d'un mois, de mi-septembre à mi-octobre, les mâles cessent de s'alimenter pour passer l'essentiel de leur temps à bramer et défendre leur territoire afin de s'attirer les faveurs des biches.
Pour la seconde année consécutive, nous nous sommes rendus dans le Parc National du Mercantour, dans la Haute-Tinée, afin de profiter de ce spectacle unique.
Au travers des photos qui suivent, je partage avec vous quelques instants capturés depuis notre poste d'observation. Voici le déroulement de ces quelques heures.
Avant même notre arrivée, les différents brames résonnaient dans la vallée, nous confirmant la présence de grands cerfs dans le secteur.
À peine installés à notre poste, nous observons notre premier grand cerf qui donne de la voix tandis que d'autres en font autant plus bas dans les bois. Nous avons la visibilité sur une crête, composée d'espaces ouverts, qui constitue la place idéale de brame que se disputent les mâles.
Vous remarquerez une pointe cassée (qu'on appelle andouiller ou cor) sur son bois droit. Nous le nommerons donc Bruel (pour casser la voix/le bois...).
Après quelques minutes à bramer, il se déplace et rentre à couvert dans les bois.
Les brames continuent à se faire entendre mais toujours plus bas, dans la forêt. Au bout de quelques minutes, un cerf surgit d'entre les arbres. Il s'agit d'un jeune (cela se remarque par sa finesse et ses bois encore petits et peu ramifiés). Nous le nommerons Poil de carotte. Il semble peu concerné par les cris rauques de ces grands frères et commence même à brouter.
Un second jeune cerf le suit. Celui-ci revêt une robe plus brune. Il s'appellera Cacao.
Poil de carotte et Cacao paraissent pacifiques à en juger par leur proximité.
Mais Cacao semble peu rassuré et fait demi-tour pour retourner dans les bois.
Nous ne l'avions pas remarqué, mais un grand cerf remontait dans leur direction. Il marque un arrêt pour regarder Cacao s'éloigner.
Puis il prend la direction de Poil de carotte.
Heureusement le jeune cerf ne l'a pas attendu et s'éloigne déjà en direction des bois.
Mais le grand cerf ne tolère pas cette intrusion sur son territoire et prend en chasse Poil de carotte.
Il le poursuit alors en bramant jusqu'à disparaître dans les bois à son tour.
Lorsqu'il réapparaît, il exprime sa victoire par un râle puissant et rauque. Il est le chef ici et sa politique est claire, aucun autre mâle, même jeune, n'est toléré. On le reconnaîtra par son bois gauche composé de 6 cors dont 4 au bout. Son nom sera Hubert le cerf.
Après cette course-poursuite, il se couche pour reprendre des forces mais continue de rappeler sa présence aux autres concurrents.
Nous profitons de cette pause pour aller manger quelques gâteaux à l'écart de notre poste d'observation et hors de leur champ de vision. Mais au moment de nous lever, nous entendons un brame tout proche et derrière nous. Nous passons la tête au-dessus des rochers qui étaient à notre hauteur et découvrons un cerf à seulement quelques mètres de nous.
Il ne lui faut pas longtemps pour nous repérer et prendre la fuite. Nous en profitons donc pour aller manger.
À notre retour, Hubert à disparu mais un petit nouveau est en compagnie d'une biche. Il s'agit d'un grand mâle assez sombre qui brame généreusement sur le territoire d'Hubert. Ce sera Chocolat.
Et à la limite du bois, un cerf lui répond. Vous le reconnaissez, il s'agit de Bruel !
Chocolat lui répond à son tour. C'est un véritable concert !
Tout cela se déroule sous les yeux observateurs et perplexes d'un jeune daguet (nom donné au jeune cerf qui n'a pas de bois ramifiés). Mais où est donc passé Hubert ???
Puis soudain au coin du bois...
Il est là, Hubert est de retour ! Son brame puissant suffit à mettre en fuite Chocolat. Probablement était-il parti chasser un autre adversaire dans les bois. Sa courte absence aura suffi aux autres mâles pour tenter une incursion. Mais Hubert en impose par sa carrure et sa voix. Dès son retour, il regagne son territoire et ses femelles. Il est incontestablement le maître des lieux.
Bruel ne peut lutter contre Hubert et se voit être obligé de s'éloigner.
Il choisit alors de s'en prendre à plus faible que lui et oblige le jeune daguet à quitter lui aussi les lieux.
Vive le roi Hubert !
Cette année, nous n'avons pas eu la chance d'assister à un combat ; malgré tout, l'émotion était grande en observant ces animaux majestueux. Rendez-vous pris pour les revoir l'an prochain !